
Le déclin du réseau pharmaceutique en France
Le réseau des pharmacies françaises, pilier traditionnel du système de santé de proximité, connaît un recul constant. Ces dernières années, le nombre d’officines a sensiblement diminué, fragilisant l’accès aux soins dans les zones rurales et accentuant les inégalités territoriales. 3S Santé fait le point sur l’évolution structurelle du réseau pharmaceutique, le maillage géographique, ainsi que les principaux facteurs explicatifs de cette contraction.
État des lieux du réseau pharmaceutique
Évolution du nombre d’officines
Fin 2023, la France métropolitaine passait sous la barre symbolique des 20 000 officines sur le territoire. On ne comptait alors plus que 19 966 officines, soit près de 2 000 de moins qu’il y a dix ans, 4000 de moins si on compare aux chiffres de 2007.
En un peu plus d’une décennie, le paysage officinal a donc évolué. Le rythme des fermetures s’est accéléré ces dernières années avec près d’une fermeture d’officine par jour ouvré (276 pour l’année 2023 et 260 pour l’année 2024).
Malgré des lancements d’officine par de nouveaux titulaires, selon l’Ordre national des pharmaciens, au 1er janvier 2025, le nombre d’officines s’élevait à 20 242.

Maillage territorial
Pour continuer l’état des lieux du réseau pharmaceutique en France on peut également s’intéresser à quelques chiffres clés concernant le maillage territorial des officines :
- La densité pharmaceutique est en léger recul : 30 officines pour 100 000 habitants en 2022, contre 34 une décennie plus tôt.
- Environ 35 % des pharmacies se trouvent dans des communes de moins de 5 000 habitants, ce qui en fait un maillage essentiel de proximité pour une grande partie de la population hors des villes.
- Pourtant, près de 5% des communes françaises (1 701), étaient dépourvues de pharmacie en 2022 malgré une population suffisante.
- Certains départements enregistrent des baisses particulièrement marquées : l’Allier (-22 %), l’Ariège (-20 %), l’Yonne (-20 %), le Gers (-19 %) ou encore la Corrèze (-18 %)
- Les “fermetures sèches” (sans reprise) constituent une majorité inquiétante des disparitions : 64,2 % en 2023, contre 45,3 % en 2022
Sources : Le Quotidien du pharmacien – La Revue Pharma – GPM : Pharmaciens en France

Comment expliquer le déclin du réseau pharmaceutique en France ?
Évolution démographique et désert médical
Depuis 10 ans, le nombre de pharmaciens titulaires a diminué de près de 10% (27 594 en 2012 à 24 913 en 2023). Cette diminution s’explique en grande partie par le vieillissement de la profession. En 2022, plus de 22 % des titulaires avaient 60 ans ou plus, contre 13 % dix ans plus tôt. Beaucoup d’officines se retrouvent donc confrontées à un problème de transmission, faute de repreneurs disponibles ou intéressés.
La difficulté de renouveler les générations de pharmaciens accentue encore cette tendance. En 2023, près de 470 places en deuxième année d’études de pharmacie sont restées vacantes, traduisant une perte d’attractivité de la filière. Dans certaines zones rurales, des officines ont même été proposées à la reprise pour un euro symbolique, sans trouver preneur. Cette désaffection témoigne des inquiétudes des jeunes diplômés face à l’avenir économique de la profession et à la lourdeur de la gestion d’une officine.
Ce phénomène est particulièrement préoccupant dans les zones rurales, où la pharmacie constitue souvent le dernier service de santé accessible sans rendez-vous. Lorsqu’un titulaire part à la retraite et que son officine ferme, les habitants se retrouvent parfois contraints de parcourir plusieurs kilomètres supplémentaires pour accéder à une pharmacie.
On parle alors de déserts pharmaceutiques, qui viennent s’ajouter aux déserts médicaux déjà existants.
Pression économique et baisse de rentabilité
Au-delà des enjeux démographiques, les pharmacies françaises font face à une pression économique croissante qui fragilise leur équilibre financier. Si le chiffre d’affaires global du secteur a pu progresser ces dernières années, c’est en grande partie grâce à l’augmentation du volume de médicaments délivrés et à l’élargissement des missions du pharmacien.
Pourtant, cette croissance apparente cache une réalité plus préoccupante : la rentabilité des officines, est en net recul, notamment pour les plus petites d’entre elles.
Ces difficultés s’expliquent par une augmentation continue des charges fixes :
- Hausse des coûts de l’énergie
- Loyers en progression
- Réévaluation des salaires du personnel
Dans le même temps, les marges sur les médicaments, réglementées par l’État, restent faibles et sont régulièrement revues à la baisse. En 2024, près de deux tiers des pharmacies déclaraient avoir vu leur rentabilité diminuer, malgré une hausse moyenne de leur chiffre d’affaires.

Réformes et contraintes réglementaires
À ces contraintes s’ajoutent les réformes récentes concernant la fixation des prix et des remboursements des médicaments. Sans oublier la nouvelle réforme sur les génériques, dont les remises commerciales seront progressivement plafonnées.
En effet, dès le 1er septembre 2025, le gouvernement a annoncé que les ristournes accordées par les laboratoires aux pharmaciens seront réduites de 40 % à 30 %, puis à 20 % d’ici 2027. Or, ces remises constituent une part essentielle de la marge officinale. Leur diminution est perçue comme une véritable menace pour la survie économique des petites pharmacies, en particulier celles situées dans les zones à faible densité de population.
A savoir : C’est pour cette raison que large des majorité des pharmacies d’officine étaient fermées ce 16 août en signe de manifestation. D’autres dates sont d’ores et déjà programmées si les craintes des professionnels d’officine ne sont pas entendues.
Enfin, les contraintes réglementaires liées à l’installation et au transfert d’officines peuvent constituer un frein supplémentaire à la revitalisation du réseau. Le numerus clausus officinal, qui encadre la densité de pharmacies par rapport à la population, empêche parfois une réorganisation plus souple et empêche la reprise de certaines officines menacées de fermeture
Face à ces multiples difficultés, de nombreux pharmaciens se retrouvent contraints de céder leur officine, souvent dans des conditions défavorables, ou de réduire leurs effectifs pour maintenir un équilibre financier. Cette fragilité économique contribue directement au déclin du réseau et accentue les inégalités territoriales en matière d’accès à la santé.
Les conséquences de l’affaiblissement du réseau pharmaceutique
Aggravation des déserts médicaux
La fermeture d’une officine n’est pas un simple événement commercial : elle accentue la fracture territoriale en matière de santé. Dans les zones rurales, où les médecins généralistes se raréfient déjà, la disparition d’une pharmacie prive les habitants d’un accès de proximité à un professionnel de santé de premier recours.
- Dans certaines communes rurales, les patients se trouvent désormais à plus de 10 km de la première pharmacie. Cela rend difficile l’accès aux médicaments et aux conseils de santé. Les personnes les plus âgées ou sans moyen de locomotion sont alors les plus pénalisées.
- La FSPF (Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France) estime qu’à ce rythme, la France pourrait voir se multiplier de véritables déserts pharmaceutiques, notamment dans les départements déjà en tension.
Accès aux soins pour les patients
Les pharmacies jouent un rôle bien plus large que la simple délivrance de médicaments sur ordonnance. Les professionnels d’officine assurent un accompagnement thérapeutique, réalisent des vaccinations, des tests de dépistages rapides…
La contraction du réseau pharmaceutique entraîne une augmentation des temps de trajet, mais aussi un report vers d’autres structures de santé, déjà saturées (médecins généralistes, spécialistes, urgences…).
Comme vu précédemment, pour les populations vulnérables chaque fermeture représente un obstacle supplémentaire à la continuité des soins, aux conseils de santé gratuits pour conduire finalement à l’isolement sanitaire d’une partie des patients dans certains territoires.
Poids sur les professionnels restants
Moins de pharmacies au sein du réseau signifie plus de pression sur les officines qui résistent et restent ouvertes.
- Les officines situées dans les zones encore desservies absorbent un volume accru de patients. Ce qui peut augmenter les délais d’attente et réduire le temps consacré à chaque personne.
- Les titulaires et équipes officinales se retrouvent confrontés à une charge administrative et logistique plus lourde. Tout en devant maintenir un service de proximité de haute qualité. L’erreur n’est pas permise quand il est question de santé.
- Cette situation accentue le risque de burn-out des professionnels d’officine. Quel que soit leur métier. Cela aggrave encore la fragilité du réseau.

Le déclin du réseau pharmaceutique en France est un enjeu de santé publique majeur. Entre la baisse du nombre d’officines, le vieillissement des titulaires, la pression économique et les contraintes réglementaires… L’avenir du maillage territorial reste fragile. Pourtant, des solutions existent pour maintenir une offre de soins de proximité et soutenir les professionnels en difficulté.
Au-delà des mesures publiques attendues, le soutien de partenaires dans des métiers annexes à l’officine peuvent jouer un rôle essentiel!. Notamment pour aider les titulaires à maintenir leur activité. Les agences de recrutement spécialisées dans les métiers de la pharmacie comme 3S Santé, constituent un levier précieux pour répondre aux difficultés de remplacement, encourager les transmissions d’officines ou encore attirer de nouveaux talents dans les zones en tension.
En facilitant le lien entre pharmaciens titulaires et professionnels disponibles (pharmaciens adjoints, préparateurs, étudiants), 3S Santé contribue à son échelle à sécuriser la continuité des soins et à préserver la vitalité du réseau officinal.